top of page

29 Octobre 2016 - Nice Matin

Nouvelles perspectives pour une vieille molécule

Comment la metformine, un médicament antidiabétique exerce-t-elle ses effets cancéreux ?

La molécule est-elle efficace sur le cancer de la prostate ? Des recherches sont conduites à Nice. C'est un médicament prescrit depuis près de 60 ans aux diabétiques. Traitement de base, bien connu et généralement assez bien toléré, la metformine se voyait il y a dix ans propulsée à la « une » de l'actualité médicale. « Des études épidémiologiques rétrospectives réalisées à cette époque montraient que des personnes diabétiques traitées par cette molécule présentaient moins de cancers (tous types confondus) que la population générale », résume Frédéric Bost, chercheur au Centre méditerranéen de médecine moléculaire, basé à Nice. Ce scientifique niçois a été l'un des premiers à se lancer alors dans le décryptage des mécanismes en jeu dans les effets anticancéreux de la metformine. En choisissant comme modèle le cancer le plus répandu, celui de la prostate. « Nous avons dans un premier temps montré sur des lignées cellulaires de cancer de la prostate que cette molécule exerçait des effets directs en empêchant la prolifération des cellules cancéreuses et en favorisant leur apoptose [mort par suicide, ndlr]. Des études ultérieures conduites chez l'animal cette fois, ont confirmé l'action de la metformine sur la croissance tumorale, mais aussi sur la formation des métastases ; après cinq semaines de traitement par l'antidiabétique, le nombre de métastases au niveau des poumons, du foie et des ganglions était nettement réduit. ».

Fort des résultats encourageants, fournis par ces études précliniques, Frédéric Bost contactait le Pr Jean-Marc Ferrero, responsable des essais cliniques au Centre Antoine-Lacassagne à Nice. « Il a aussitôt accepté de mener un essai en faveur des patients souffrant de cancer de la prostate métastatique. » L'étude menée en double aveugle, à laquelle a participé une centaine de patients en France (dont une majorité dans la région), s'est achevée fin 2015. Les résultats sont en cours d'analyse et devraient être connus dans quelques mois [lire encadré].


S'il s'agit du seul essai clinique en France sur le cancer de la prostate, plus d'une centaine d'autres sont conduits à travers le monde, étudiant les effets de la metformine sur des tumeurs de natures très différentes (sein, côlon ou encore poumon). Avec pour certaines tumeurs, des effets très encourageants : « On a observé par exemple qu'un traitement d'un an par la metformine réduisait fortement l'apparition de polypes colorectaux », cite Frédéric Bost.

D'autres essais cliniques évaluent les effets préventifs de la metformine. « Ceux-là incluent des patients indemnes de tous cancers et non diabétiques, traités par cette molécule. L'objectif est de mesurer sur une période de dix ans, l'incidence de cancers dans cette population, comparée à une population témoin. »


Concernant le mode d'action de la metformine, les connaissances continuent, elles aussi, de progresser, grâce notamment aux travaux menés par l'équipe de Frédéric Bost. « La metformine pourrait agir de deux manières. Elle aurait une action directe sur les cellules cancéreuses en les privant de l'énergie dont elles ont besoin pour se multiplier. Elle pourrait agir aussi plus indirectement, via l'insulinémie (taux sanguin d'insuline). La metformine diminue, en effet, la synthèse de glucose hépatique, et augmente le transport de glucose dans les muscles et le tissu adipeux. D'où une diminution de la glycémie (taux de glucose dans le sang), qui se traduit elle-même par une diminution de l'insulinémie. » L'insuline étant un facteur de croissance des cellules, sa diminution dans le sang sous l'action de la metformine, pourrait ainsi avoir un effet bénéfique en termes de croissance tumorale. « Un peu comme on l'envisage pour les effets anticancéreux de l'aspirine, la metformine pourrait intervenir au niveau des premières phases de la formation des tumeurs. » Les vieux médicaments sont-ils les molécules de futur ?


« L'étude qui vient de se clore a été conduite auprès de 100 patients présentant un cancer de la prostate métastatique résistant à la castration chimique, et en comparant les effets d'une chimiothérapie seule ou d'une combinaison chimiothérapie plus metformine », explique le Pr Jean-Marc Ferrero. Pour comprendre l'enjeu de cette étude, l'oncologue propose une synthèse des différentes étapes de la prise en charge du cancer de la prostate. « Quand il est localisé, on opère et c'est tout. En cas de rechute, et lorsqu'il existe des métastases, le traitement de référence est la castrarion chimique [traitement hormonal visant à supprimer la production des androgènes, ndlr]. C'est efficace - au prix d'effets secondaires - mais malheureusement au bout d'un certain temps, les patients ne répondent plus. C'est là que la chimiothérapie est proposée, avec une nette amélioration de la survie. Le problème, c'est que si on l'interrompt, la maladie repart dans près de 90 % des cas. Notre espoir est que la metformine améliore les effets de la chimio, mais surtout, qu'elle puisse maintenir le patient en rémission, lorsque l'on arrête la chimio. »

©2018 by TARGETING PROSTATE CANCER CELL METABOLISM. Proudly created with Wix.com

bottom of page